lundi 2 mars 2020

Aquarelle sur carte marine

©Axel Pivet - Sous voiles - 2020 - Aquarelle sur carte marine

Dans un précédent article, je vous ai raconté la force évocatrice d'une carte marine, a fortiori lorsqu'elle est ancienne.
C'est un support magique, bien que capricieux et complexe à manier, pour y peindre un voilier ancien, lui aussi évocateur de voyages, de sorties en mer, de "belle plaisance".
Voici l'histoire d'un nouveau tableau, réalisé sur deux jours pendant un week-end, après plusieurs semaines de réflexion et de gestation. J'avais bien en tête l'ambiance globale, restait à trouver un modèle de voilier d'une part et une carte qui puisse correspondre d'autre part.



Or j'avais en stock dans un carton à dessin la moitié haute d'une carte au format portrait (le format paysage étant bien plus courant), correspondant à la baie d'Audierne, en Finistère Sud. Vous avez déjà rencontré la partie basse de cette carte, dans un précédent tableau dont la réalisation pas à pas vous a été présentée dans un précédent article du blog.

©Axel Pivet
La carte est de belles dimensions : 63 centimètres de large et 47 de haut. Je l'accroche par des pinces sur un carton à dessin de format Grand Aigle, reposant sur un chevalet de table légèrement incliné pour pouvoir faire l'esquisse, puis presque à plat pour poser les lavis.

©Axel Pivet
Pour une aquarelle de ce type, le dessin est une part essentielle du tableau : le respect des proportions et des perspectives, un rendu réaliste sans pour autant entrer trop dans les détails (à chacun son style à ce sujet !). Peindre sans croquis, ou en laissant un dessin malhabile, diminuerait l'impact final ce qui, sur une carte de cette ancienneté, serait dommage voire relèverait du gâchis.

©Axel Pivet
Passage du lavis du ciel (léger) et de la mer (plus soutenu). 
Sur ce papier, je n'utilise pas de gomme à masquer, qui pourrait marquer le support et laisser des traces contre productives : il faut donc réserver des blancs avec prudence.
Dans le premier jet du lavis, et compte tenu de ma position debout pour peindre, le trait d'horizon est fluctuant ; un second passage en mouillant le premier jus permettra de fondre l'ensemble pour rectifier et redresser l'horizon.
On voit également que le papier d'une carte marine ancienne, qui a subi pendant son usage en passerelle les micro-perforations du compas à pointe sèche, absorbe les pigments vers les trous invisibles à l'oeil nu, ce qui provoque des "taches". Il est inutile de lutter contre et bien au contraire il faut faire avec : soit cela entrera dans l'histoire de la réalisation du tableau en évoquant cette première vie "opérationnelle" à la mer, soit ces taches entreront dans le rendu global, comme ce sera le cas ici.


La couleur et le dessin sont interrompu en partie haute : c'est un choix de rendu délibéré pour laisser le voilier comme évanescent.
C'est aussi par expérience que j'ai fait ce choix : le trait de côte sur ces cartes est foncé pour marquer le relief et on voit bien combien le port d'Audierne, dans l'axe du mât, est encaissé ce qui aurait rendu illisible le haut de la peinture, par concurrence entre l'aquarelle, transparente, et le fond imprimé.

©Axel Pivet

On voit toutefois, sur ce zoom sur le voilier, que les pigments d'aquarelle extra-fines (c'est-à-dire de la qualité supérieure, dite "qualité artiste") de la maison Sennelier sont assez lumineux pour l'emporter sur l'impression de la carte, qui apparait néanmoins par transparence de la couleur.
L'équilibre est ici atteint.
Quelques rehauts de gouache blanche permettent d'ajouter de l'écume ; en principe cela aurait été fait par des réserves dans le blanc, ou par l'usage de gomme à masquer, mais sur le papier d'une vieille carte des réserves de ce type peuvent encrasser le lavis. Des repentirs par absorption ultérieure ne seraient pas non plus la solution, car le papier étant ancien a une patine grisâtre  qui rend les ouvertures ainsi pratiquées insuffisamment lumineuses. On s'en rend bien compte en comparant l'écume à la coque (pour laquelle le "blanc" du papier a été préservé), les deux teintes sont nettement différentes.

©Axel Pivet - Sous voiles - 2020

Et voici le rendu final, quelques goélands sont ajoutés discrètement dans le ciel, la signature est portée assez haut pour rester visible lors de l'encadrement.
Le tableau est maintenant proposé à la vente, sur la galerie du Croque-Maître.




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