lundi 25 juin 2018

Exposition de mes carnets au Palais de justice de Paris


Tous les deux ans l'Ordre des avocats de Paris organise une exposition pour permettre aux avocats, magistrats, greffiers mais aussi aux membres de leurs familles de présenter leurs oeuvres, tableaux, photographies, icônes, sculptures.
Lors de la précédente édition j'étais venu faire un croquis dans cette magnifique salle haute de la bibliothèque des avocats, salle historique ouverte en 1905 où se tiennent aujourd'hui les séances de la Conférence du Stage, concours d'éloquence de haut niveau. Une consoeur qui me voit faire m'a alors demandé pourquoi je n'exposais pas ; défi relevé cette année en déposant ma candidature.


J'ai sélectionné trois vues dans les carnets A4, plus présentables en raison de leur format (60 x 21 cm) mais parfaitement représentatifs du style du carnet de voyage. Manhattan, l'embouchure de l'Aven en Bretagne et Venise. 
La grande table destinée à accueillir les sculptures laissait un espace assez grand pour les disposer en éventail sur des petits chevalets, maintenus ouverts par des pinces. Ainsi positionnés plutôt qu'accrochés aux panneaux de présentation - qui sont perpendiculaires à la salle - les carnets sont mieux mis en valeur, en plein milieu de la salle et sous le regard du visiteur.


Je découvre alors une sensation évidemment pour moi inconnue jusqu'ici, l'appréhension de laisser des oeuvres auxquelles on tient sans surveillance particulière (même si une permanence est assurée chaque jour), exposées aux risques de se faire manipuler, accrocher, renverser. Dès le vernissage la proximité des sacs à main portés à l'épaule, juste à hauteur des carnets par des personnes regardant ailleurs et n'ayant aucune conscience de l'amplitude de leurs mouvements, m'a causé plus d'une angoisse. Sans parler des coupes de champagne ou autres verres posés négligemment à côté des carnets, comme si l'aquarelle faisait bon ménage avec des liquides en liberté !
J'imagine aisément que pour un artiste professionnel ces risques font partie du métier, j'ai trouvé cette sensation infiniment désagréable.


Le Palais de justice est désormais beaucoup moins fréquenté, depuis l'ouverture du nouveau Palais aux Batignoles qui draine l'essentiel de l'activité judiciaire si bien que le nombre de personnes susceptibles de venir jusqu'à la bibliothèque des avocats est très limité. Il faut savoir que l'exposition est en cours, il faut trouver la bibliothèque, ce qui n'assure une fréquentation que minimaliste.
Pour ma part il ne s'agit pas de vendre, mais du plaisir d'exposer et le taux de fréquentation n'est pas ma préoccupation majeure. J'avais envie d'échanger, de pouvoir parler de l'art du carnet de voyage mais finalement les visiteurs se font discrets, ils circulent silencieux dans la salle sans chercher le contact. Les conversations se font davantage avec les autres exposants, surtout les professionnels, qui se font plus diserts. 

Le carnet de voyage attire car c'est, au milieu de ces toiles, de ces photos encadrées, un genre totalement à part et autorise des oeuvres plus spontanées (selon l'expression qui m'est le plus souvent revenue dans ces conversations).
Voilà qui assure au moins un petit succès d'estime même si pour moi cette première exposition a été une belle émotion. On ne peint pas pour soi seul mais aussi pour le plaisir de partager ; les réseaux sociaux y contribuent très largement, le canal plus traditionnel de l'exposition était intéressant à explorer.


Je suis en synthèse ravi d'avoir pu participer, malgré le très peu de temps laissé entre l'annonce de l'évènement et son ouverture, qui a limité le délai d'information, notamment auprès de mes clients ravis d'apprendre que leur avocat avait une autre facette dans sa vie.
C'est un plaisir de rencontrer d'autres artistes, j'ai envie de dire "des vrais", pour recueillir leurs aspirations, leur vision de leur art.
C'est aussi un plaisir d'entendre ce que d'autres pensent de mes carnets, qui sont faits avant tout pour être parcourus par d'autres que moi et ne pas rester livres fermés.
A poursuivre !




lundi 4 juin 2018

Week-end de Pentecôte à Lorient

©Axel Pivet - Penn Ar Roz
Quand l'agenda offre trois jours pour s'évader de Paris, cap à l'Ouest la famille transporte ses bagages jusqu'à Lorient, au bonheur du grand air quand le soleil sans mordre caresse la peau.
Dès la première pause pour avaler un café le carnet est de sortie car lui aussi s'est senti frustré par cette période d'abstinence. Soudain le coucher de soleil transforme la route en théâtre d'ombres. Il n'est jamais facile de dessiner en mouvement mais quand le spectacle est hypnotique il faut en profiter.

©Axel Pivet - sur la route de Bretagne
Au matin les rideaux s'ouvrent sur une vue que j'ai croquée ou peinte maintes et maintes fois mais qu'importe, je ne peux m'empêcher de m'y remettre. Le café du matin sur la terrasse de la maison, orientée vers le sud, sous le grand parasol déporté, invite toujours à peindre.
Aujourd'hui je renouvelle l'exercice mais en limitant l'esquisse à l'encre à son strict minimum, pour laisser la couleur créer les volumes. Le résultat est doux et léger, en cohérence avec l'ambiance qui entoure une telle vue.

©Axel Pivet - Vue sur le Scorff
Après une bonne journée qui a permis de faire sortir le bateau de l'hiver, retirer sa bâche, nettoyer la poussière et les coulées vertes, une petite sortie pour se dérouiller la coque et faire chanter le moteur, je me suis assis dans un fauteuil installé en vis-à-vis d'un miroir en pied.
Un pinceau qui passe par là et voici un autoportrait sans esquisse, avec un miroir réduit en proportions.

©Axel Pivet - autoportrait dans le miroir

©Axel Pivet - Iris dans le jardin
Un week-end à Lorient c'est un appel à l'indolence, prendre le temps de ce que l'on veut faire sans contrainte, sans se précipiter, sans être tenu de regarder sa montre à chaque instant (d'ailleurs je n'en porte plus une fois descendu de la voiture).
Le regard se perd dans la contemplation ; on ne regarde rien de précis, juste se laisser aller, se faire bercer par la respiration lente des arbres d'un jour sans vent, goûter son café. Même le thème le plus naïf devient sujet à peindre car en effet tout est bon pour justifier de ne pas bouger, le temps de finir le croquis. C'est comme ça qu'on arrive presque en courant à la messe...

©Axel Pivet - Au petit déjeuner au Roz

©Axel Pivet - Messe de la Pentecôte
Cette joyeuse indolence est communicative même en dehors du cadre de la maison, il suffit pour cela de s'installer au bord de l'eau pour se faire gagner par cette torpeur du plaisir de goûter l'instant.

©Axel Pivet - A Keroman depuis la crêperie PC La Base

©Axel Pivet - A bord de Pistache sur le Blavet
Plaisir de goûter l'instant, ce pourrait être la devise de chaque sortie en mer, surtout quand le lendemain il faudra être de retour à Paris : il faut se gorger de ce bonheur simple, l'odeur de l'iode qui monte à vous, le ronronnement du moteur et le gargouillis le long de la coque, autant de sons, autant d'odeurs qui vont avec une promenade en mer et qui participent à ce simple bien-être.

©Axel Pivet - A bord de Pistache
Pistache se dérouille, retrouve avec plaisir les longues foulées en remontant le Blavet, taille dans la vague, galope ses 5 noeuds après avoir passé près de 9 mois attaché à son ponton. L'eau qui court sous sa coque contribue à lui nettoyer les oeuvres vives qu'un long hiver avait encrassé.
Et moi je retrouve le plaisir d'être à bord, de le contempler, brave compagnon marin. Ce sera bref mais déjà suffisant pour se donner l'énergie des derniers mois avant la rupture estivale quand enfin il sera possible de sortir chaque jour en mer.

©Axel Pivet - Pistache au ponton de Kerhervi

©Axel Pivet - Penn Ar Roz
Dans le jardin le jeu des lumières est jeu de charmes, qu'elles soient douces ou éblouissantes, pâles ou nettes. Peindre la façade nécessite parfois de se protéger les yeux si la maison se fait reflet blanc d'une lumière crue.
Au matin au contraire le calme ambiant contribue à une sensation cotonneuse que ne vient pas troubler la moindre ride de vent. Les contours sont imprécis, la nuance entre le ciel et l'eau tient à la fusion des éléments. La vallée au loin n'est qu'un horizon en silhouette.

©Axel Pivet - Vue sur le Scorff 
Sortons avant de devoir reprendre la route et revenir dans le quotidien. Les Courreaux de Groix, entre la côte de Larmor et l'île de Groix, sont un terrain de jeu d'un côté pour les professionnels de la mer et parmi eux désormais les skippers et équipages de course au large, et de l'autre pour tous les amateurs de mer. Depuis la plage c'est un ballet, coupé à intervalle régulier par le courrier qui traverse.
Eclat des voiles sous le soleil surtout un dimanche de régate quand les spinnakers sont de sortie. La mer est paisible, respirant doucement à marée descendante, mais fraiche à ne pas mettre un doigt de pied dans l'eau. Pourtant des baigneurs sont déjà là, ou encore là pour ceux qui ont pris l'habitude de nager toute l'année.

©Axel Pivet - A Larmor Plage
Le week-end se termine, il faut reprendre la route et revenir à Paris mais les yeux chargés de cette vue, l'esprit encore balancé par le roulis de Pistache, le nez plein de ces saveurs marines, et attendre de revenir.