mercredi 12 janvier 2022

Eloge de ne rien faire, carnet d'audience au tribunal judiciaire de Paris


Salle d’audience des référés du tribunal judiciaire de Paris, véritable grand messe tant la foule d’avocats est compacte. 

En cette période de pandémie, la présence du public n’est pas encouragée, les robes noires sont donc quasi exclusives. 

Il faut faire la queue pour faire inscrire son dossier dans la pile, premier arrivé, premier servi, premier à plaider. 

Or le temps d’arriver et me voici en queue de peloton. Les renvois étant appelés en premier, puis les affaires plaidées, s’ouvre devant moi l’abysse du temps d’attente, temps incertain, variable selon les péripéties d’audience. 

Des dossiers sont à peine plaidés, d’autres provoquent des débats houleux, certains enfin, en matière de construction, appellent en une fois jusqu’à 15 avocats. 

Ceux-là vident la salle d’un coup. 


Difficile de travailler, assis sur un banc à la longue parfaitement inconfortable, difficile de lire car tout est source de déconcentration. 




Alors le mieux est d’accepter comme un luxe de ne rien faire. 

Savoir se laisser gagner par le loisir de ne pas avoir à réfléchir, de ne pas avoir à rédiger, à motiver, à argumenter, à négocier. 

Admettre que l’on peut se retrouver dans une salle d’audience comme on peut l’être dans son salon près d’une cheminée qui ongle doucement, se laissant gagner par une douce torpeur, regardant sans rien regarder, autour de soi, profitant juste de l’instant présent. 

Dans une vie de professionnel libéral, cela peut paraître une hérésie, quand tout devrait être facturé. 

Mais il arrive des temps où si rien d’autre n’est faisable, se débattre ne servirait à rien. 

C’est comme un temps volé, un temps sorti de nulle part puisqu’il ne devrait pas exister. 

Admettre de ne rien faire et admettre de ne pas s’en sentir coupable. Qu’il est doux de ne rien faire quand tout s’ajoute autour de soi !



 

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