mardi 10 octobre 2017

Court week-end à Perpignan


On ne voyage pas toujours pour le plaisir, l’essentiel est alors de voyager avec plaisir, même si les conditions ne sont pas idéales d’un esprit serein. Ainsi au bout des embouteillages parisiens, passé le temps d’attente dans un salon quelconque d’une gare qui parait déserte, le train de nuit qui relie les destinations de Rodez, Port-Bou et Latour Carol (heureusement, ce n’est qu’un train qui se partage en trois). L’excitation de retrouver un compartiment couchette, comme dans mon enfance quand toute la famille en occupait un pour partir pendant les vacances de juillet. Je n’ai pas envie de descendre le rideau jusqu’en bas pour profiter, le nez sortant du drap couette, du paysage nocturne qu’une pleine lune vient éclairer. Aller à Perpignan en passant par Bordeaux n’est pas le chemin le plus court, nous y passerons une partie de la nuit. Mais pourquoi la SNCF laisse-t-elle ses TGV allumés à l’arrêt ?


Magie du réveil quand devant les yeux le paysage du Minervois défile dans les premières lueurs du jour. Je reste toujours émerveillé comme un enfant quand le voyage me projette aussi vite dans l’ailleurs. Hier les rues de Paris sous la grisaille, ce matin le sud et son soleil généreux ; la nuit entre les deux a effacé les distances.




L’arrivée le long de la cote catalane se fait par une bande de terre qui traverse les étangs de Leucate, donnant l’impression de circuler sur l’eau qui nous entoure de droite et de gauche. Au loin, derrière la langue littorale, la mer se laisse deviner.


La mer que sans tarder nous irons voir en profitant d’une période creuse dans la saison, ce ne sont pas les vacances ni un week-end prolongé, pour visiter Collioure. Impossible de s’y rendre en été tant les places sont rares et le petit café en bord de plage commençait à manquer depuis le temps ! Les pointus sont encore là, colorés et bien alignés, encore à flot pour faire plaisir aux visiteurs en offrant une vision carte postale de la région.
Le temps du croquis fait disparaître le temps qui passe et presque oublier les raisons de notre venue dans la région.


L’après-midi nous voit au centre hospitalier de Perpignan. Le temps d’un café permet de profiter d’une verrière qui abrite d’impressionnants bananiers. La vue de la chambre se perd au loin vers les Corbières dont on aperçoit les éoliennes brasser le vent permanent.



Pour se gorger d’air et se remplir les yeux de mer, car ce soir il faudra déjà repartir, prenons la route de Canet en Roussillon. La plage est déserte, qui d’ordinaire est noire de monde quand l’été est là, offerte au calme et propice à la méditation devant un spectacle sans doute déjà croqué mais toujours hypnotique. Les Pyrénées se jettent à l’eau avec les Albères, barrière avant l’Espagne, parfait exercice de perspective atmosphérique.


Comment ne pas se laisser prendre par le jeu des vagues. Elles viennent sans cesse à l’assaut du rivage, sans espoir de gagner faute de marée. Elles se gonflent comme on bombe le torse, se précipitent en avant en s’inclinant pour finir en rampant, puis recommencent. La lumière qui les traverse au moment de déferler me fascine.


Retour à l’hopital ; depuis les couloirs la vue sur les Pyrénées est attractive. Je choisis de faire abstraction du pavillon de médecine du sport (oui j’ai eu le temps de visiter dans l’espoir de trouver une vue totalement dégagée) pour me concentrer sur le Canigou, vierge de neige, dressé au-dessus de la plaine du Roussillon, gardien millénaire de la région. J’aime cette montagne, son allure fière mais accessible (la preuve, j’ai réussi à la gravir jusqu’au sommet !) et le dessin est le seul média à même d’en rapporter une vue panoramique pour quiconque ne serait pas équipé d’un matériel sur-puissant ou d’un drone.


Voyage retour, le train cette fois traverse la France de jour et laisse le temps de croquer au vol un mas isolé. Tant que la ligne n'autorise pas les grandes vitesses, il est encore possible d'apprécier la vue ; la traversée des étangs entre Leucate et Sigean exerce tout son pouvoir d'attraction. La Franqui au loin me donne l'occasion de revoir les rivages d'Henry de Monfreid. Mais bientôt la vitesse s'affole, le paysage n'est plus qu'un ruban qui défile si vite qu'il en devient flou, les yeux se posent sur un livre, la rêverie est finie.